La présidentielle, c’est pas compliqué



Le système électoral à deux tours

Isabelle Guinaudeau
5 Mars 2022


Le mode de scrutin désigne la méthode utilisée pour déterminer qui est élu sur la base des suffrages exprimés. C’est quelque chose auquel on pense rarement, mais qui a des conséquences décisives sur les résultats des élections et la politique.

Le président français est élu au scrutin majoritaire à deux tours.

Au premier tour, on a le choix entre tous les candidats qui ont obtenu les 500 parrainages permettant de se présenter. Si un candidat recueille la majorité absolue des voix (ce n’est jamais arrivé), il est élu.

Sinon, un second tour est organisé avec un choix considérablement réduit puisqu’il n’oppose plus que les deux candidats arrivés en tête au premier tour. Celui des deux qui obtient la majorité devient président.

Nous sommes habitués à ce système mais il est loin d’être le seul. Les élections organisées aux différents niveaux (local, régional, national, européen) et dans d’autres pays utilisent des modes de scrutin très variés. Cette variété est particulièrement grande pour l’élection des parlements (donc de nombreux élus à la fois) : dans les pays où on utilise un scrutin proportionnel, on décompte l’ensemble des voix obtenues par chaque parti au niveau national et on distribue les sièges selon leur score, laissant une chance aux petits partis d’obtenir quelques sièges. Dans les pays comme la France qui utilisent un scrutin majoritaire, il y a une élection par circonscription et il sera difficile pour les petits partis de remporter le seul siège en jeu.

Une élection présidentielle ne désignant qu’un seul élu, le scrutin est forcément majoritaire. Mais là encore, on trouve des variations, comme aux États-Unis où le président est élu de façon indirecte : les citoyens votent pour des grands électeurs qui élisent ensuite le président. Dans d’autres pays, comme l’Islande, il n’y a qu’un tour. Le candidat arrivé en tête remporte alors l’élection, même s’il n’a pas obtenu beaucoup de voix. C’est précisément ce que le deuxième tour est censé éviter en France : il permet au président élu d’avoir reçu une majorité des voix.

Ce mode de scrutin est critiqué. Les candidatures ayant tendance à se multiplier, les chances de passer au second tour – et donc de peser énormément sur le résultat final – deviennent assez aléatoires. En 2017, quatre candidats – Emmanuel Macron, Marine Le Pen, François Fillon et Jean-Luc Mélenchon – sont arrivés dans un mouchoir de poche. À quelques milliers de voix près, François Fillon ou Jean-Luc Mélenchon auraient pu accéder au second tour et l’élection aurait pu désigner quelqu’un d’autre. En 2002, déjà, le candidat socialiste Lionel Jospin fut éliminé dès le premier tour face à un grand nombre de concurrents de gauche, alors qu’il était donné gagnant au second tour face à Jacques Chirac comme à Jean-Marie Le Pen, les deux candidats maintenus. Ce contexte favorise le « vote utile ». L’idée est qu’il est plus rationnel de voter pour le candidat qui a le plus de chances d’arriver au second tour, parmi ceux que l’on trouve acceptables.

Tout cela est susceptible de peser sur la légitimité du président élu s’il n’a atteint qu’un score faible au premier tour, même en bénéficiant du « vote utile ». Toutefois, les propositions de modes de scrutin alternatifs, comme le jugement majoritaire permettant de noter l’ensemble des candidats, ne semblent pas avoir eu beaucoup d’écho pour l’instant.